
Pierre
Il est des rencontres rares, qui marquent durablement.
Celles avec Dame Tilda en font partie. Dans le peu de moments que j’ai eu l’honneur de partager avec elle, j’ai découvert une manière d’être et de dominer qui m’a profondément touché. Ce qui m’a frappé d’abord, c’est ce mélange singulier, presque déroutant, entre une rigueur implacable et une humanité profonde. Ses gestes sont précis, toujours inventifs, portés par une intelligence du corps et du lien que je n'ai jamais rencontrée auparavant.
Sous sa conduite, l’épreuve devient offrande, et la soumission, loin de l’humiliation, devient une forme de vérité partagée. Dame Tilda sait mener les choses à leur juste intensité — jusqu’au bord, mais jamais au-delà. Elle sait créer cet état si particulier où la douleur devient écoute, où le corps tendu s’ouvre, consent et s’abandonne.
Son regard, noir, franc, jamais distrait, semble sonder chaque frémissement, chaque repli, chaque élargissement intérieur. Et dans la chaleur de ce regard, une once de douceur veille, silencieuse.
Je garde en mémoire certains instants très précis : la morsure lente d’un instrument sur ma peau, un assemblage savant de liens autour de mon torse, la caresse soudaine qui vient suspendre le supplice, la tiédeur de sa salive mêlée à l'odeur, plus intime, de sa présence. Ces détails sensoriels restent gravés, comme les balises d’un voyage intérieur qu'elle m'a aidé à accomplir. Elle sait éveiller ce que je croyais endormi, faire vibrer la chair avec une lenteur étudiée, attentive, jusqu’à ce que le plaisir et la douleur deviennent indistincts, inséparables. Elle donne du sens à chaque geste, et ce sens se grave dans la peau autant que dans l’âme. Chaque rencontre m’a laissé avec un sentiment de gratitude. Gratitude pour la confiance qu’elle m’accorde, et que je lui témoigne en retour. Pour le soin qu’elle met à chaque geste. Pour la profondeur qu’elle donne à chaque instant. Il y a, dans les supplices qu’elle impose, quelque chose qui relève du don — un don rare, mêlé de générosité et de tendresse cachée, que seul un esprit aussi fin et cultivé que le sien peut offrir.
Je lui dois de m’être senti à la fois vulnérable et digne. Et cela, pour moi, vaut tout. Avec toute ma loyauté et mon respect.